Accueil A la une Cosmétiques en Tunisie: Une fiscalité inéquitable qui pénalise l’industrie locale

Cosmétiques en Tunisie: Une fiscalité inéquitable qui pénalise l’industrie locale

La filière est sous la pression d’une double imposition fiscale, ce qui freine l’investissement, outre l’entrave à la commercialisation des produits locaux. En effet, les produits cosmétiques importés sont soumis à un droit de consommation calculé sur la base de leur prix d’achat, contrairement au fabricant local qui paie sa taxe sur la base de son prix de vente. Plusieurs fabricants locaux sentent l’injustice et appellent à des mesures pour rétablir l’équilibre à travers notamment une réforme fiscale équitable.

La Presse — Depuis 2018, les produits cosmétiques en Tunisie sont soumis à un droit de consommation de 25%, en plus de la TVA qui est actuellement à hauteur de 19%. Initialement instaurée comme une mesure temporaire pour soutenir le budget de l’État, cette taxe devait disparaître après deux ans. Pourtant, en 2025, elle est toujours en vigueur, et ses effets s’avèrent particulièrement néfastes pour l’industrie cosmétique locale.

Au-delà de la hausse des prix pour les consommateurs, cette taxation pèse lourdement sur les industries locales, qui peinent à investir et à créer de l’emploi. Mais le problème principal réside dans une inégalité flagrante entre les industriels tunisiens et les importateurs.

En effet, l’importateur paie le droit de consommation de 25 % sur son prix d’achat, tandis que l’industriel tunisien doit s’acquitter de cette même taxe sur son prix de vente. Une différence qui entraîne une distorsion du marché et favorise, de manière paradoxale, les produits importés au détriment de la production locale.

Un double fardeau fiscal

Prenons un exemple frappant de cette double taxation. Une crème hydratante importée, revendue à 10 dinars hors taxes, est taxée à 750 millimes de droit de consommation. Puis, elle subit une imposition de 1,900 dinar de TVA. Au total, elle est taxée à 2,650 dinars, soit 26%. La même crème fabriquée en Tunisie et vendue à 10 dinars hors taxes est taxée à 2,500 dinars de droit de consommation ! À cela s’ajoutent 1 % de Fodec (100 millimes), 19 % de TVA (2,394 dinars). Le total des taxes imposées au produit localement fabriqué s’élève à 4,994 dinars, soit 50 % de taxation !

En conclusion, le prix final de la crème importée est de 12,600 dinars. Celui de la même crème mais fabriquée localement est presque de 15 dinars !

Autrement dit, les industriels tunisiens paient plus du triple en droit de consommation et le double en taxes totales par rapport aux importateurs, ce qui réduit leur compétitivité et limite leur développement.

Dans ces conditions, plusieurs questions se posent : pourquoi fabriquer en Tunisie ? Pourquoi investir dans l’industrie locale alors que l’importation est largement favorisée ?

Une réforme fiscale plus équitable pour rétablir l’équilibre

Face à cette situation injuste, plusieurs pistes peuvent être envisagées pour une réforme fiscale plus équitable du droit de consommation. Selon un fabricant tunisien de cosmétiques, il serait plus judicieux d’appliquer une imposition de 75 % de droit de consommation aux produits cosmétiques importés et 25 % aux produits locaux pour compenser l’écart de calcul, ou dans une deuxième proposition, de réduire le droit de consommation sur les industriels cosmétiques locaux à 7 %, tout en maintenant 25 % pour les produits importés. Sinon, une troisième proposition stipule un calcul du droit de consommation aux importateurs sur leur prix de vente, et non plus sur leur prix d’achat. Ou, tout simplement, opter pour un démantèlement de ce droit de consommation, initialement prévu pour 2 ans à partir de 2018, et qui est encore en vigueur !

Si la Tunisie aspire à un développement économique durable, il est urgent de corriger ces distorsions fiscales qui entravent la croissance de son industrie cosmétique. À l’heure où le protectionnisme devient une tendance mondiale, les États-Unis taxant à 25 % les produits importés pour protéger leur marché intérieur, la fiscalité tunisienne semble suivre une logique inverse. Il est temps d’agir pour une fiscalité plus juste et un soutien réel à l’industrie tunisienne. Jusqu’à quand cette situation va-t-elle persister ? Va-t-on continuer à pénaliser les producteurs locaux au profit des importateurs ? Tant de questions que se posent les industriels locaux…

Le «Made in Tunisia» ne doit pas être une victime ! Il est temps de défendre nos emplois, notre industrie, notre souveraineté économique.

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